« Le ministère de la Transition écologique vient d’alourdir [les conditions nécessaires pour affirmer qu’un produit ou service est neutre en carbone], de telle sorte que nous sommes sans doute revenus à l’idée première d’une interdiction sans dérogation ». (Arnaud Gossement, avocat spécialisé en droit environnemental)
La loi AGEC
Et de fait, c’est bien dans une loi qui apparemment ne concerne pas spécialement la communication que nous trouvons cette obligation. Au fil des publications, les décrets d’application de la loi AGEC (Anti gaspillage pour une économie circulaire) durcissent en effet les conditions de communication autour des objectifs de décarbonation de l’activité.
Le décret du 13 avril 2022 relatif à la compensation carbone et aux allégations de neutralité carbone dans la publicité oblige ainsi concrètement une entreprise qui souhaiterait utiliser les termes comme :
- neutre en carbone, zéro carbone,
- empreinte carbone nulle,
- climatiquement neutre,
- intégralement compensé,
- 100 % compensé
d’être désormais être en mesure de publier des preuves sous forme d’annexe :
- le bilan carbone en analyse du cycle de vie (ACV) du produit ou service concerné,
- la trajectoire visée de réduction de ses gaz à effet de serre (GES), associé à ses objectifs de progrès annuels sur au moins 10 ans (avec une révision tous les 5 ans),
- ainsi que les modalités de compensation de ses émissions résiduelles, c’est-à-dire celles ne pouvant être évitées malgré des efforts pour éco-concevoir en amont, ou recycler en aval ; il devra en outre préciser la nature et la description de ses projets de compensation, ainsi que laquelle des trois tranches de prix sera sélectionnée (en-dessous de 10€/tCO2, entre 10 et 40€/tCO2 ou au-dessus de 40€/tCO2).
Des contraintes et des obligations environnementales inédites pour une communication responsable
Ce niveau de détail et ces preuves demandées eu égard à la méthodologie, la précision du périmètre retenu, les modalités de traitement des étapes d’utilisation et de fin de vie, les données prises en compte pour la consommation d’électricité et de gaz, les zones géographiques d’émissions, les émissions dues au transport international constituent ainsi une obligation inédite dans le domaine des contraintes environnementales et de la communication responsable !
César Dugast, Responsable du pôle Neutralité Carbone chez Carbone4 et auteur d’une note à charge sur le projet de décret, trouve quant à lui que ce qui est demandé reste relativement simple. Notamment pour une grande entreprise, car elle dispose d’équipes nécessaires pour produire les pièces demandées, et le montant de l’amende prévue, soit 100 000€, reste peu pénalisant.
Certes, des moyens de contourner la loi restent, et certains pourraient être tentés de ne publier qu’une trajectoire peu ambitieuse pour s’assurer que la baisse des émissions ait bien lieu.
Mais quoi qu’il en soit, cette loi marque un tournant important dans le contrôle de l’activité économique.
Lire également à ce sujet l’article de NOVETHIC : « EN ABUSANT DE LA FORMULE « NEUTRALITÉ CARBONE », LES ENTREPRISES S’EXPOSENT À « L’EFFET BOOMERANG »
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